Il existe une variété de lichens qu’on appelle « hépatiques des fontaines ». Comme les mousses, les prêles ou les fougères arborescentes, elles existent depuis le carbonifère (environ 300 millions d’années).

Dans les anciennes latrines de l’abbaye de Maubuisson et pour l’exposition collective Pro Liturgia : ordinatrices du temps présent, Cécile Beau reconstitue, à l’aide de ces plantes dites « fossiles », un jardin des premiers temps incluant, dans son champ visuel, l’eau qui s’écoule en dessous de la pièce. Un environnement sonore, composé de bruits d’insectes, d’oiseaux ou de pluie, baigne l’installation dans une ambiance idéale à laquelle s’associent les douches de lumière qui soutiennent la croissance des plantes. Ainsi côtoyons-nous une nature que la main humaine n’aurait pas touchée et qui est pourtant là, bien vivante, témoignant du rapport de force entre nature et culture qui se joue depuis les débuts de l’ère anthropocène.

Pour l’entretien du jardin, Cécile Beau a choisi un arrosage manuel qui exige la participation du personnel de l’abbaye, de même que les moniales de jadis, habitantes de ce lieu cistercien datant du XIIIème siècle, prenaient soin de leurs terres. Notons enfin que les « hépatiques » tiennent leur nom de leur usage dans le traitement des maladies du foie, évoquant ainsi le savoir des moniales en matière de plantes médicinales. Peut-être cette installation nous invitera-telle à en finir avec la toute-puissance exercée par l’homme sur la nature.

Images : © Cécile Beau, Fontaine Hépatiques